Sur la route, entre Bukhara et Samarcande, tout change. Les paysages sont nettement moins arides, le vert est partout et les cultures sont nettement plus diversifiées (vergers - pommiers essentiellement -, maïs, basilic, tomates, en plus du sempiternel coton), des troupeaux de vaches, chèvres, moutons, des petits ruisseaux bordés de bouleaux et peupliers, avec en fond une montagne pelée marron taupe. C'est beau, c'est frais ! On ne s'en lasse pas ! Les gens aussi ont changé de physionomie : visage moins rond, traits plus fins et teint plus mat. On trouve vraiment un paysage agricole tel qu'on le conçoit chez nous. Facile dans ce cadre de trouver un chouette campement, après un repas viandard (aucun moyen de se comprendre dans la cambrousse… à côté des samsas fourrés à la viande, les soupes que nous avions commandées se sont avérées être de la viande grillée (très bonne, mais quand un ventre demande une soupe, il accueille avec la grimace le rab de bidoche !) dans une "guinguette agricole" de bord de route.
four à samsas
Arrivée à Samarcande avant midi, on demande à l'hotel Marokand si on peut laisser le camion pas loin et profiter des toilettes, mais le lieu de s'y prêtant pas, il nous envoie dans l'hôtel Bibi Khanum (derriere l'impressionnante mosquée du même nom et on y découvre des ruelles tranquilles), mais la nuit à 85$ nous refroidit !
On hèle une jeune femme dans la rue près du Registan pour lui demander si elle sait où on peut faire du change, elle nous amène chez sa mère qui nous change 50 $ et après 10 min de discussion, elle nous propose de dormir chez eux sur le Tabchan (sorte de grand lit dans la cour de leur petite maison où tout le monde s'assoit pour manger, puis sur lequel on entasse plein de couvertures matelassées et colorées pour y dormir). Les filles acceptent d'une seule voix avec un enthousiasme communicatif ! Du coup, nous voilà à prendre le tchoi (thé) accompagné du raisin de la courette nous allons manger qqs brochettes dans un resto où nous emmène Monica, la fille de Maia et Otkur, qui vit là avec son fils Fayusbek (5 ans) et son petit frère Jameshed qui est coiffeur… Allez, rien de tel pour se fondre dans la masse que de se faire une petite coupe locale (j'aime les risques !! Jamais eu autant de monde autour de moi à s'occuper de ma tête !)...
L'anglais de la famille est très approximatif, mais Maïa a très envie de communiquer, avec son manuel d'anglais, donc on y arrive ! Salomé est rebaptisée Salamita et moi Albina pour l'occasion, nos prénoms ne sont pas à la mode ouzbek (eh oui… le charme d'un prénom ne tient qu'à ça)... Monica nous amène visiter la mosquée BibiKhanoum (impressionnante mais en train de s'écrouler à nouveau, Shahi-Zindah, magnifique sur sa colline et sa dizaine de mausolées (toute la famille de Tamerlan !), le Registan immense et magnifique à la nuit tombée.
Nous vivrons au rythme de la famille pendant 3,5 jours. Reçus par Maia qui est "chef cuisto" et Monica qui fait tout le reste (vaisselle, ménage et autre). Le plov (de Tachkent et de Samarcande), les chachliks et le halva (ceux qui ont été "nourris" au bon chocolat de cacao ne verront toujours pas l'intérêt de ce "chocolat" maison et pas cher qui consiste à faire brunir la farine à la poële - patience recommandée -, ajouter de l'huile et du sucre) n'auront plus de secret pour nous. Erika est aux anges de pouvoir cuisiner avec Maia qui veut la garder en stage à Samarcande, tandis qu'Otkur garderait plutôt Pénélope (qu'il fait rimer avec antilope) qui le fait beaucoup rire !
Nous assistons aussi à une cérémonie d'offrandes que fait Maia sur fond de lecture du Coran (femmes autorisées uniquement. J'avoue que je décline lâchement prétextant devoir m'occuper des devoirs des filles. Plutôt satisfaite de mon choix quand je la vois ressortir avec du sang de poulet partout sur les membres et le visage pour lui garantir bonne santé !!). Les filles sont déçues de ne pas avoir pu assister à l'égorgement de la poule !
Monica nous raconte sa situation compliquée ici puisque divorcée d'un mari qui la battait au bout d'à peine 6 mois de mariage… Avec un fils, impossible pour elle d'envisager un avenir avec un autre homme en Ouzbékistan, elle rêve de repartir ailleurs et avoir d'autres enfants ; c'est fou ces "rêves" qui nous sont accessibles et tellement compliqués ailleurs (même si du coup, tout est faussement idéalisé…) ! Son salon de manucure marche bien, mais elle vient d'avoir un diplôme de design de vêtement et compte démarrer cette activité. Nous nous promettons d'essayer de voir comment l'aider à obtenir un visa pour passer quelques temps en France (les choses ont l'air tellement compliquées pour eux pour voyager). Les parents quant à eux ont obtenu pendant que nous étions chez eux leur carte verte pour rester 5 ans aux US où se trouve Aziz le fils ainé, chef dans un teppanyaki japonais et qu'ils n'ont pas vu depuis 8 ans. Grosse fête donc, à base de vodka ! (avec modération ici, pas comme en Russie)
Du coup, on aura des invités dans le camion pour Tashkent. On amène Maia, Monica et Fayuz à l'ambassade des USA pour récupèrer les green cards et on passera la nuit chez sa sœur dans un village au Sud. Go to Tachkent !