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Le caravansérail de Qazvin et châteaux des assassins accrochés aux montagnes... brrrr

Qazvin est une belle surprise. Cette petite ville a une atmosphère détendue et artiste : son palais Chehel sotun, compact et ses arcades enluminées, belle maison de riche marchand avec ses portes à vitraux, à battant, coulissantes à l'horizontale ou à la verticale, ses 2 jolies mosquées et surtout son caravansérail géant totalement restauré en boutiques d'artisans et cafés (pour une fois que l'on trouve des cafés, dans ce joli cadre de briques et de verdure :)… On aurait envie de tout acheter dans ces petites échoppes de briques chaleureuses où les artisans travaillent à la douce lumière qui filtre à travers les fenêtres en bois. on rencontre Mojgan qui nous invite à boire le thé dans sa boutique, son père confectionnant toutes sortes de figurines en métal, boîtes à musique de bois, verre et papier peints ou impressions et elle la peinture sur tous supports, et sa voisine qui tient le café Déjà vu (la signification de son prénom, Mejez ?). Ils nous envient - encore une fois notre liberté - et nous félicitent en nous disant que nous sommes des parents formidables, et qu'ici, en Iran, voyager avec ses enfants leur semble bien trop compliqué et aventureux. Nous faisons le plein de bricoles colorées franchement pas chères et un capuccino pour la route.

Ces artistes artisans iraniens sont incomparables. Ils recherchent le beau dans tout ce qu'ils font… comme tous les artistes vraisemblablement… mais eux ont une technique pour l'atteindre, une technique séculaire, apprise (infusée dès leur naissance sans doute, dans les poèmes, leurs livres de chevets, les gestes de leurs aïeux, les palais et merveilles d'architecture qui les entourent…), mîitrisée et appropriée. Cela donne des objets émouvants, mystérieux, subtiles qui ont une âme. C'est le seul pays où j'ai vu autant de pièces franchement belles, soient restaurées subtilement soit neuves et pleines de finesse, sorties d'une imagination mêlée à une culture millénaire et d'un savoir-faire assuré, où j'ai eu envie de posséder des objets (une tasse aux roses bleu nuit, un carreau de carrelage figurant de vieilles roses griffées, une boîte à musique, une bague d'or lisse et pur sertissant en toute simplicité une pierre naturelle, des tuniques ou manteaux aux teintes délicieuses et aux matières nobles, subrepticement glamour…)., réalisés sous nos yeux par les artisans passionnés et heureux (ou s'en approchant, même s'ils ont de quoi se plaindre aussi) et dans des lieux bohèmes (quoi de plus bohème et poétique qu'un vieux caravansérail réhabilité en ateliers d'artistes ?).

On oscille entre soleil et pluie, éclairs et éclaircies, avec des ciels torturés à la fois sombres et lumineux qui sont les plus beaux. Nous nous sommes même fait cueillir par des grêlons gros comme l'ongle du pouce que les filles collectionnent comme des billes éphémères, nous jetant dans le 1er restaurant abri (un resto à touristes, sans dizi ni qeimeh…, que des kebabs... Il y en avait un !!).

Ce ciel capricieux mais qui distribue ombre et lumière aux reliefs qu'il surplombe, nous accompagne encore sur la route montagneuse pour Lambasar, un des châteaux des assassins (littéralement des fumeurs de hashish, ou "hashishyuns" d'où le nom… qui, entrainés dans la secte - et accessoirement drogués - d'un seigneur local détroussaient ce qu'ils pouvaient). La route enchaine les montagnes vertes et rouges (dans des tons plus lumineux et clairs que la montagne kurde), les vallées et petits plateaux qui abritent de minuscules villes ou villages aux toits de tôle colorés. Un paysage de creux et de bosses aux couleurs changeantes, qui chaque seconde nous offre un autre point de vue. Fascinant.

La grimpette jusqu'aux ruines est joyeuse et tonifiante : un vrai bol d'air, de soleil et de pluie pour arriver sur un mélange de rochers, ruines et prairie d'herbe tâchée de coquelicots vermillons. Les filles sont aux anges.

Après cette bouffée d'oxygène, nous continuons pleins d'enthousiasme (moi en tous cas, manu un peu plus soucieux de la route) notre minuscule route de montagne splendide en direction de la Caspienne et Lahijun… mais bientôt notre route, déjà sinueuse et étroite, se transforme petit à petit en piste terreuse aux bas-côtés plus qu'incertains, aux parois qui s'éboulent et au sol qui s'effrite, des ornières et crevasses apparaissent, le tout sous un ciel torturé et menaçant (la perspective de la pluie sur cette route toute en glissements potentiels ne nous enchante guère !). Une manœuvre hasardeuse pour prendre un virage en épingle, le van glissant en arrière aura raison de notre confiance ! Demi-tour… Le 3ème seulement depuis le début du voyage tant nous n'aimons pas repartir en arrière : il y a eu Otgontenger, la montagne mongole qui a eu raison de notre butée d'embrayage, puis la jungle du Ratanakiri au Cambodge et cette non-route de montagne friable comme un sablé. Il faut dire que CP commence à être fatiguée et nous attendons la Turquie pour lui refaire une santé. La sagesse arrive lorsqu'on a trop poussé (ou avec la peur !).

Du coup on se rabat sur le 2ème château des assassins le plus célèbre, Qazor Khan, traversant toujours cette montagne pleine d'hommes à moustaches et de femmes en fichus colorés qui lavent des herbes aux sources ou réservoirs d'eau, de jeunes bergers et de petits vieux sur des ânes blancs bien harnachés. Cette fois, le site est carrément impressionnant… et la reconstitution présumée du château trouvée sur Google nous emporte tout droit vers des châteaux enchantés en colimaçon au sommet d'un rocher ! Cf photos

On tombe sur Nathalie et ses 2 grands ados Mina et Cyrus qui habitent à Lille mais ont leur grand père à Téhéran. Nous déjeunerons ensemble d'un délicieux Mirza ghazeimi (œufs brouillés à l'aubergine, tomate, oignons) à l'ombre d'un grand cerisier vue sur le château.

Alamut tel qu'on l'imaginait à l'époque

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